Ascension du Seigneur – Année A
Matthieu 28,16-20

Références bibliques :

  • Lecture des Actes des Apôtres : 1. 12 à 14 : « D’un seul coeur, ils participaient à la prière. »
  • Psaume 26 : « La seule chose que je cherche, c’est d’habiter la maison du Seigneur. »
  • Lettre de saint Pierre : 1 Pierre 4. 13 à 16 : » afin d’être dans la joie et l’allégresse quand sa gloire se révélera. »
  • Evangile selon saint Jean : 17. 1 à 11 : « La vie éternelle, c’est de te connaître. »

Les onze disciples s’en allèrent en Galilée, à la montagne où Jésus leur avait ordonné de se rendre.
Quand ils le virent, ils se prosternèrent, mais certains eurent des doutes.
Jésus s’approcha d’eux et leur adressa ces paroles : « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. Allez donc ! De toutes les nations faites des disciples, baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit ; et apprenez-leur à garder tous les commandements que je vous ai donnés. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. »


zundel-ascension-1-1005x585

Devenir témoin du Christ monté aux cieux
Maurice Zundel

Billet de Maurice Zundel, paru dans Témoin d’une espérance, p. 186-188.
Illustration: N. Semitecolo, La sainte Trinité, Musée diocésain, Padoue (Italie)

 «Tu es Simon, fils de Jean: tu t’appelleras Pierre.» C’est ainsi que l’Evangile nous présente la première rencontre de Jésus avec saint Pierre. Ce changement de nom annonce la mission de l’Apôtre et dessine déjà la figure de l’Eglise, bâtie sur cette pierre vivante. La première pensée du Seigneur, au commencement de sa carrière publique, vise donc cet organisme dont tout homme est appelé à être membre: l’Eglise.

“NOUS AVONS CONSTRUIT L’ÉGLISE-MAISON AVEC LES PIERRES DE NOS COLLINES. MAINTENANT COMMENCE LE VRAI TRAVAIL QUI EST DE CONSTRUIRE L’ÉGLISE-CORPS-DU-CHRIST AVEC LES PIERRES VIVANTES QUE NOUS AVONS À DEVENIR.”

Pour saisir la primauté de cette intention, il faut se rendre compte du caractère propre de la Révélation chrétienne. Le Christ n’apporte pas une doctrine, un enseignement, un système. Des mots par eux-mêmes, en effet, nous laissent aussi étrangers à la Vérité et à l’Amour qu’ils nous laissent extérieurs à nous-mêmes. Des tonnes de discours n’ont jamais rien changé à rien. Ce que l’Evangile nous apporte, c’est le jour de l’intimité divine.

Mais la lumière d’une intimité, nous le savons, ne peut se faire jour que dans une autre intimité que l’amour identifie avec elle. Il était donc impossible que le jour de l’Intimité divine nous devant réellement et totalement présent autrement qu’en transparaissant dans un être humain, dont la personnalité s’enracinerait dans cette Intimité au point de se confondre avec elle et le rendrait apte, par là même, à nous la communiquer sans ombre ni limite.

Tel est le secret de l’lncarnation, qui fait de Jésus, tout ensemble, le Révélateur et la Révélation. Mais, s’il en est ainsi, il est clair que la Révélation chrétienne n’est pas séparable de la Personne de Jésus, puisqu’elle coïncide rigoureusement avec elle.

Il s’ensuit que cette Révélation ne restera au niveau d’elle-même à travers l’histoire que si Jésus en Personne demeure avec nous. Tout le mystère de l’Eglise est là: Jésus présent, en Personne, dans la communauté qui est le signe visible et le corps sacramentel de sa Présence réelle.

Mais il est de toute évidence que l’Eglise ne peut être le signe visible du Christ toujours présent comme est visible un caillou, mais comme le sourire d’un visage peut être le signe visible d’une intimité dont il nous communique le rayonnement. C’est le sens profond du divin jeu de mots: “Tu es Simon, fils de Jean; tu t’appelleras Pierre… et sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise.”

Car justement, l’Eglise ne pourra être construite que de pierres vivantes, capables de laisser transparaître le jour de l’Intimité divine en qui tout devient Vie.

Depuis l’Ascension, le Christ invisible, quoique toujours présent, ne peut être visible qu’à travers l’Eglise, c’est-à-dire à travers nous. C’est à chacun de nous qu’il appartient d’être, pour les autres, son Visage.

Tout est là: nous avons construit l’église-maison avec les pierres de nos collines, avec le ciment et le fer. Nous en sommes heureux et humblement fiers.

Maintenant commence le vrai travail qui est de construire l’Église-Corps-du-Christ avec les pierres vivantes que nous avons à devenir.

http://www.mauricezundel.com

L’Ascension, une Fête !

Il m’est déjà arrivé de penser que l’Ascension n’était pas un jour de fête. N’était-ce pas plutôt un temps de tristesse et de deuil, une brisure dans la belle relation établie par Jésus avec les siens ?  L’Ascension, c’était la disparition du Seigneur. On éteignait le cierge pascal pour dire son départ. Élevé au ciel, il n’était plus accessible, il nous était enlevé. Cela  ne pouvait être que triste. C’était comme si Jésus nous abandonnait.  Est-ce bien de cela qu’il s’agit vraiment?

De fait je n’ai pas vu dans les textes liturgiques, autant dans la messe que dans la Prière des heures, de quoi être triste, au contraire. On souligne partout le caractère festif de cet événement. Même qu’autrefois on en faisait un jour férié, le jeudi de la 6e semaine de Pâques, dix jours avant la Pentecôte. C’est d’une fête de joie et d’espérance qu’il s’agit.

D’abord il faut nous dire que la grande tristesse que nous rappelle chaque année la liturgie chrétienne, c’est la passion et la mort du Christ : son agonie, son arrestation, sa condamnation, sa mort en croix et sa mise au tombeau. C’était nos souffrances qu’il portait, nos blessures dont il était affligé. Dieu a voulu en venir jusque là pour épouser notre humaine condition.  Ces mystères douloureux nous émerveillent pourtant, tellement ils nous révèlent le grand amour dont Dieu nous a aimés dans le Christ.

Ce parcours de souffrance et de mort ne pouvait pas être le dernier mot. Depuis le matin de Pâques, le soleil du ressuscité a paru dans le monde. La clarté d’une espérance illumine le ciel des croyants. Quoiqu’il arrive nous savons que nous sommes du côté de Pâques. Le Christ ressuscité des morts ne meurt plus. Sur lui la mort n’a plus aucun pouvoir. Le ressuscité a vaincu la mort, notre mort. Il est apparu aux disciples en homme nouveau et libre.  Il fait d’eux des hommes et des femmes libres et sauvés.  D’où notre joie, une joie rien ni personne ne peut nous enlever.

La fête de l’Ascension – ce matin – nous permet de le souligner avec force : Pâques a marqué à jamais un changement dans nos rapports avec Dieu.  Certes le Christ ressuscité n’est plus là physiquement à nos côtés, mais il nous est présent d’une façon toute spirituelle et surnaturelle. Si le Christ s’élève dans le ciel, ce n’est pas pour fuir ni pour s’évader. Ce mouvement nous dit que sa victoire est totale et définitive. Il ne se cache pas, il nous emporte avec lui en quelque sorte, il vient vers nous et nous allons vers lui, par la foi, dans la joie de l’espérance et la force de l’amour. C’est ainsi que notre relation au Christ peut désormais se vivre au plan le plus intérieur et le plus personnel de nos vies. Alors que tous ensemble nous composons avec lui son Corps qui est l’Église, dont il est la tête. Il est le chef glorieux et sauveur. Sa puissance de vie rejoint tous ses membres.

Et si Jésus donne rendez-vous aux disciples en Galilée, l’évangile nous dit que c’est pour leur confier une mission. L’événement rapporté ce matin est d’une grand importance. Se retrouver en Galilée c’est se retrouver chacun chez nous en quelque sorte. C’est partir de notre terrain familier, le milieu ordinaire et très fréquenté de nos labeurs, de nos joies, de nos rencontres, de nos amours. C’est là que le Seigneur ressuscité nous donne rendez-vous. Il nous convie pour nous dire qu’il nous aime. C’est de là qu’il souhaite nous voir partir pour aller vers les autres et leur annoncer l’amour du Père et la joie du salut. C’est là qu’il nous fait confiance et nous communique déjà de son énergie spirituelle, qui fait notre joie constante, notre élan renouvelé, notre bonheur d’aimer comme lui, de rayonner sa présence et de dire son pardon au cœur du monde.

Par Jacques Marcotte, o.p.
http://www.spiritualite2000.com

Vous serez mes témoins

Quarante jours après Pâques, nous fêtons l’Ascension de Jésus ressuscité. C’est le jour où il disparaît au regard de ses apôtres. Comme eux, nous avons notre regard tourné vers le ciel. Mais en même temps, nous ne devons pas oublier de regarder vers la terre ; c’est le message de l’ange aux apôtres : « Pourquoi restez-vous là à regarder le ciel ? » En d’autres termes, nous chrétiens, nous sommes « citoyens du ciel » ; nous marchons ici-bas vers notre patrie définitive. Oublier notre foi au Christ ressuscité serait pour nous un aveuglement mortel. Mais cela ne doit pas nous faire négliger la mission confiée par le Christ : « Allez donc, de toutes les nations, faites des disciples… »

Pour cette mission, ils ne seront pas seuls : « Vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit Saint qui viendra sur vous. Alors, vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie et jusqu’aux extrémités de la terre » (Actes 1. 9). Puis il disparaît à leur regard. C’est ainsi que l’Ascension ouvre le temps de l’absence. Jésus n’est plus visible. Pour les apôtres, c’est le commencement de la mission, c’est l’annonce de la bonne nouvelle à tous.

C’est important pour nous aujourd’hui. L’Ascension nous renvoie à notre mission sur la terre. En tant que chrétiens baptisés et confirmés, nous avons à témoigner de notre foi en Jésus ressuscité. Certains le font au péril de leur vie. Il ne se passe pas un jour sans qu’un chrétien ne soit persécuté. On veut les obliger à renier leur foi. Mais ils préfèrent mourir plutôt que de trahir le Christ. Leur témoignage nous interpelle : où en sommes-nous de notre attachement au Seigneur Jésus ? N’oublions jamais qu’en entrant le premier dans le monde de Dieu, il nous ouvre un passage. Il est le premier de cordée. Mais rien ne se passera si nous ne le suivons pas.

Cette bonne nouvelle est pour tous, pas seulement pour les plus proches, les plus réceptifs et les plus accueillants ; nous sommes envoyés pour porter le Christ en tout milieu, jusqu’aux « périphéries ». Nous ne devons pas laisser de côté celui qui semble le plus loin ou le plus indifférent. Le Seigneur est à la recherche de tous. Il veut que tous ressentent la chaleur de son amour et de sa miséricorde. Il désire vraiment les rassembler tous auprès de lui. Sa grande priorité va vers ceux et celles qui sont très loin et très bas.

L’Évangile de saint Matthieu ne parle pas directement de l’Ascension. Mais en y regardant de près, nous constatons que son message rejoint celui des Actes des Apôtres. L’événement se passe en Galilée. Cette région dont on disait qu’il ne pouvait rien sortir de bon était un lieu de passage pour les caravanes qui venaient de partout. Toutes les croyances et même l’incroyance s’y affrontaient. Or c’est à cet endroit méprisé que Jésus commence son ministère. Et c’est de là que les apôtres vont partir pour annoncer la bonne nouvelle de l’Évangile. Celle-ci doit être proclamée dans le monde entier. Le Seigneur est à la recherche de ceux qui sont loin, ceux qui se sont égarés, ceux qui vivent dans le vice et le péché. Il les appelle tous à accueillir la bonne nouvelle de l’Évangile.

Cette bonne nouvelle n’est pas seulement pour les plus proches, les plus réceptifs, les plus accueillants. Allez, portez le Christ en tout milieu, jusqu’aux « périphéries ». Ne laissez pas de côté celui qui semble le plus loin et le plus indifférent. Le Seigneur est à la recherche de tous. Il veut que tous ressentent la chaleur de sa miséricorde et de son amour. Son grand projet, c’est de rassembler toute l’humanité dans son Royaume, y compris ceux qui sont très loin et très bas.

Quand nous allons l’église, nous nous imprégnons de l’amour qui est en Dieu ; puis nous sommes envoyés pour le communiquer autour de nous. Le monde doit pouvoir découvrir en nous quelque chose de l’amour passionné de Dieu pour tous les hommes. Il est important que notre cœur soit de plus en plus accordé à son infinie tendresse pour l’humanité. Alors, ne perdons pas une minute. C’est à chaque instant que nous avons à rayonner de cette lumière qui vient de lui.

Cette fête vient donc nous rappeler le but de notre vie. Nous avons pris l’habitude de parler du « pont de l’Ascension ». Quatre jours de congé, c’est très apprécié. Mais en parlant de pont, on ne croyait pas si bien dire. Avec Jésus, l’Ascension est un pont qui nous permet de passer d’une rive à l’autre ; nous sommes en marche vers ce monde nouveau qu’il appelle le Royaume des cieux ; c’est là qu’il veut rassembler tous les hommes. C’est cette bonne nouvelle que nous avons à annoncer aux hommes et aux femmes de notre temps. Rien ne doit l’arrêter. Les violences, les guerres, les catastrophes n’auront pas le dernier mot. Le Christ ressuscité veut nous associer tous à sa victoire sur la mort et le péché.

Nous sommes à dix jours de la Pentecôte. Les apôtres en ont profité pour faire une retraite. Tous, d’un même cœur, étaient assidus à la prière. Le livre des Actes des Apôtres nous parle de la présence de avec Marie la mère de Jésus. Avec elle et avec toute l’Église, nous te supplions, Seigneur : « Envoie ton Esprit qui renouvelle la face de la terre. »

Abbé Jean Compazieu
http://www.dimancheprochain.org

Ascension : Ailleurs et ici même

La résurrection de Jésus est bondissement dans la vie de Dieu, passage à l’invisible. C’est pourquoi les récits d’apparition n’ont qu’un but: montrer qu’il est vivant, mais de telle sorte qu’on ne le reconnaît pas au premier abord. Il est « ailleurs ». Vraiment ailleurs? Matthieu lui fait dire : « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des siècles. » Mais ce Dieu-avec-nous n’est plus perceptible avec les yeux, seulement par la foi. C’est cela que signifie l’Ascension, qu’il faut bien se garder de concevoir comme un déplacement spatial : Jésus ne s’évade pas dans les galaxies. Il est plutôt passé de l’autre côté du voile, ce voile que seul peut percer le regard de la foi. Épreuve pour la foi que ce nouveau corps que l’Esprit va lui donner et que nous appelons Église. D’une certaine façon, l’Église est ce voile qui cache et révèle à la fois. Le mouvement vertical du Christ se double d’un déplacement « horizontal », celui des disciples à la surface du globe. Ascension et envoi sont toujours liés, c’est frappant dans nos textes : « Vous serez mes témoins […] jusqu’aux extrémités de la terre.» «Partez donc, de toutes les nations faites des disciples ». En Éphésiens 4,9-13, Paul relie étroitement la descente du Christ «au plus bas» et sa remontée «au plus haut», non seulement à l’évangélisation, mais encore au fonctionnement du « corps du Christ » pour « l’œuvre du ministère ». Nous sommes, tous ensemble, le corps-signe de la présence du Christ au monde.

Les cieux où monte le Christ

Les disciples doivent un jour rejoindre le Christ dans la maison du Père (Jean 14,1-3). D’autres textes nous parlent du mouvement inverse. Le Temple a toujours été considéré comme la demeure de Dieu. Or, en Jean 14,23, nous lisons que le Père et le Fils viendront faire leur demeure en ceux qui garderont la parole du Christ. Déplacement de l’homme vers Dieu, déplacement de Dieu vers l’homme. De même, au chapitre 2 de la première lettre de Pierre, nous sommes assimilés aux pierres vivantes qui forment le Temple où Dieu habite. Notre corps, dit Paul, est temple de l’Esprit (1 Corinthiens 6,19). Il y a donc dans l’Écriture toute une ligne qui voit dans notre humanité la vraie demeure de Dieu. Il est certes inaccessible, et c’est un des sens du « Notre Père, qui es aux cieux », mais il est là, dans sa création. En nous. En fin de compte, les cieux où monte le Christ, c’est nous, nous en communion. Et c’est aussi « le Père », car nous sommes en Dieu et Dieu est en nous (Jean 17,22-23).

Marcel Domergue
https://croire.la-croix.com

Ascension : Vers la foi sans voir

Jésus par sa résurrection, il est passé dans la vie de Dieu : il est déjà « monté au ciel ». C’est pourquoi il n’est plus à portée de mains de ses disciples : leurs rencontres avec lui prennent la forme d’apparitions. Vivant, oui, mais ailleurs. Un ailleurs qui est en même temps une présence plus proche qu’autrefois parce qu’elle leur est intérieure. Au fond, l’Ascension a lieu chaque fois que, pendant les quarante jours symboliques, il les quitte sans qu’ils puissent le retenir, comme par exemple à l’auberge d’Emmaüs. L’Ascension est d’abord une disparition pour les cinq sens et Jean pourra écrire au passé : « Ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nos mains ont touché du Verbe de vie…» (1 Jean 1,1). Maintenant, on a changé de régime : on est passé du régime de la vue au régime de la foi par l’accueil du témoignage apostolique. La finale de notre évangile, qui est aussi la finale de tout l’Évangile selon Matthieu, nous dit tout cela.
L’ASCENSION n’est pas seulement disparition pour nos cinq sens, elle est aussi route ouverte, accès à la vie de Dieu.
L’Écriture est hantée par la question de la « demeure de Dieu » : Où Dieu réside-t-il ? Où peut-on le rencontrer ? La réponse sera donnée en Jean 14,23 : « Si quelqu’un m’aime (…) mon Père l’aimera (…) et nous ferons chez lui notre demeure. » Tel est le ciel où monte le Christ, à la fois Dieu et nous, puisque nous devenons « participants à la nature divine ».
NOUS VOICI DONC EN DIEU et Dieu en nous, par le Christ. Il est vrai que cela n’est pas encore manifesté, selon le mot de la première Lettre de Jean (3,2). Et pourtant nous pouvons le considérer comme réel. Il en résulte que l’Ascension ne concerne pas uniquement Jésus. Toute l’humanité et tout l’humain, que le Christ porte en lui, sont partie prenante de cet accès à la vie de Dieu.
Nous sommes donc habités par la force de l’Ascension et associés à la victoire du Christ.

Marcel Domergue
(
extraits)
https://croire.la-croix.com

“Allez, de tous les peuples faites des disciples”
Romeo Ballan mcci

L’Ascension est une nouvelle épiphanie. Les lectures bibliques et d’autres textes de la liturgie présentent cette fête comme une manifestation glorieuse de Jésus. Déjà dans la I lecture on nous parle de la nuée qui est le lieu des manifestations de Dieu, on parle d’hommes (des anges) tout de blanc vêtus. En l’espace de deux versets il n’y a pas moins de quatre références au ciel, et on y annonce le retour de Jésus dans les temps à venir… (v. 9-11). St. Paul (II lecture) présente l’issue finale d’une oeuvre difficile et paradoxale, que Jésus a pourtant menée à bon terme: il est assis à la droite du Père dans les cieux, plus élevé que toute autre autorité et puissance, constitué chef sur l’Église et sur toute autre réalité (v. 20-22). Les événements qui structurent la fin de la vie de Jésus illuminent et donnent tout son sens au chemin de souffrance qui l’a précédé. “C’est pour cela que Jean parle d’exaltation, donc d’ascension de Jésus le jour même de sa mort sur la croix: mort – résurrection – ascension constituent le seul mystère pascal chrétien, qui voit en Dieu le salut de toute l’histoire des hommes et de l’être cosmique. Même les quarante jours, dont on parle dans Actes 1,2-3, évoquent un temps parfait et définitif que l’on se gardera bien d’interpréter comme une information de valeur chronologique” (G. Ravasi).

L’accomplissement de l’événement (mystère pascal de Jésus) donne raison à l’espérance joyeuse de l’Église, ainsi qu’à la confiance assurée des fidèles, d’être appelés à vivre un jour avec le Christ dans sa gloire (Préface). C’est là que le dynamisme apostolique et l’optimisme des missionnaires de l’Évangile trouvent inspiration et force. Ainsi se justifie leur assurance d’être porteurs d’un message qui, par la résurrection, est garant d’une expérience de vie réussie. Il ne s’agit absolument pas d’une expérience de faillite, mais d’une vie déjà pleinement réussie en Jésus Christ. Réussie également, bien que encore partiellement, comme une promesse, dans la vie du chrétien et de l’évangélisateur.

À partir de cette expérience intérieure de vie nouvelle en Jésus Christ, les Apôtres, ainsi que les missionnaires de tous les temps, deviennent ses “témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie et jusqu’aux extrêmes limites de la terre” (Ac. 1,8), dans un parcours qui s’ouvre successivement du centre (Jérusalem) vers un territoire périphérique qui a les dimensions du monde entier. Tous les peuples (Évangile) constituent le champ du travail missionnaire confié à l’Église: vers eux Jésus envoie ses disciples avant de monter au ciel (v. 19). Il les envoie grâce à la plénitude du pouvoir (v. 18) qui lui appartient en tant que Fils de Dieu et en tant que Kurios (Seigneur) glorifié: “Allez donc et de tous les peuples faites des disciples, par le Baptême… l’enseignement…“ (v. 19-20). Une mission qui sera possible par la force de l’Esprit Saint, que nous implorons, en communion avec Marie et les Apôtres, en attendant une Pentecôte toujours nouvelle.

Ce donc (oun-ergo: en grec et en latin, respectivement) signifie une conséquence incontournable: il indique en effet la racine et la continuité de la mission universelle, venant de la Trinité-même, pour se prolonger dans l’espace et le temps à travers l’Église, qui est envoyée à tous les peuples, assurée par la présence permanente de son Seigneur: “Je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde” (v. 20). D’après l’interprétation de Matthieu, Jésus ne s’éloigne jamais des siens, il se limite à changer la forme qu’il donne à sa présence. Il demeure avec eux pour toujours: Il est pour toujours l’Emmanuel, le Dieu avec nous (Mt 1,23), que les évangiles annoncent dès les débuts.

Les verbes concernant la mission demeurent d’une actualité durable pour l’éternité. ‘Aller’ se traduit par le dynamisme et le courage nécessaires pour s’intégrer pleinement aux situations toujours nouvelles. ‘Faire de tous les peuples des disciples’ signifie les inviter non pas à partager une doctrine, mais à suivre une Personne. ‘Baptiser’ indique le sacrement qui introduit la personne dans le mystère trinitaire, pour qu’elle en sorte entièrement transformée. ‘Enseigner à observer’ rappelle la réponse des disciples à la voix de leur Maître et Pasteur. Il a accompli l’œuvre du salut en faveur de tous les peuples. Maintenant il appelle et envoie d’autres disciples, pour qu’ils reprennent cette même mission. Engagé sur les routes du monde, le chrétien est toujours dans la tension que suscitent en lui d’une part son regard vers le ciel, et d’autre part l’exigence de travailler à la transformation de la terre. A celui qui ne regarde que vers le haut les anges viennent du ciel (Ac 1,11) pour lui rappeler la mission à accomplir sur la terre. Mais pour celui qui ne regarde que la terre, St. Paul se charge de lui rappeler vers quelle espérance nous sommes appelés (Eph1,18). Synthèse du tout, c’est la mission au nom de Dieu, auprès de tous les peuples. Voilà le don et le mystère de toute vocation au service de l’Évangile dans le monde.