Quatrième Dimanche de l’Avent (A)
Mathieu 1,18-24

Références bibliques
- Lecture du livre du prophète Isaïe : 7. 10 à 16 : « On l’appellera Emmanuel, c’est-à-dire, Dieu avec nous. »
- Psaume 23 : « Voici le peuple de ceux qui le cherchent, qui recherchent la face de Dieu.»
- Lettre de saint Paul aux Romains : 1. 1 à 7 : « La Bonne Nouvelle que Dieu avait déjà promise par ses prophètes dans les saintes Ecritures. »
- Evangile selon saint Matthieu : 1. 18 à 24 : « L’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit-Saint. Tu lui donneras le nom de Jésus, c’est-à-dire : le Seigneur sauve. »
Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 1,18-24.
Voici comment fut engendré Jésus Christ : Marie, sa mère, avait été accordée en mariage à Joseph ; avant qu’ils aient habité ensemble, elle fut enceinte par l’action de l’Esprit Saint.
Joseph, son époux, qui était un homme juste, et ne voulait pas la dénoncer publiquement, décida de la renvoyer en secret.
Comme il avait formé ce projet, voici que l’ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse, puisque l’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit Saint ;
elle enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus (c’est-à-dire : Le-Seigneur-sauve), car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. »
Tout cela est arrivé pour que soit accomplie la parole du Seigneur prononcée par le prophète : ‘Voici que la Vierge concevra, et elle enfantera un fils ; on lui donnera le nom d’Emmanuel’, qui se traduit : « Dieu-avec-nous »
Quand Joseph se réveilla, il fit ce que l’ange du Seigneur lui avait prescrit : il prit chez lui son épouse.
L’AVONS-NOUS PAS BESOIN DE DIEU PARMI NOUS?
José Antonio Pagola
Il y a une question que je me pose chaque année au moment où je commence à observer dans les rues les préparatifs qui annoncent l’arrivée de Noël: que peut-il y avoir encore de vrai derrière ces fêtes si gâchées par les intérêts des consommateurs et par notre propre médiocrité? Je ne suis pas le seul. J’entends beaucoup de gens parler de la superficialité de Noël, de la perte de son caractère de fête familiale et intime, de la manipulation honteuse des symboles religieux et de tant d’excès et d’absurdités qui détériorent Noël aujourd’hui.
Mais, à mon avis, le problème est plus profond: Comment une société qui vit pratiquement de dos à Dieu et qui détruit de tant de façons la dignité de l’être humain peut-elle célébrer le mystère d’un «Dieu fait homme»?
Comment «la naissance de Dieu» peut-elle être célébrée dans une société où le fameux professeur français G. Lipovetsky, en décrivant l’indifférence actuelle, a pu dire ces mots: «Dieu est mort, les grandes finalités se sont éteintes, mais tout le monde s’en fiche, voilà la bonne nouvelle»?
Apparemment, beaucoup de gens se fichent de croire ou de ne pas croire, d’entendre que «Dieu est mort» ou que «Dieu est né». Leur vie continue de fonctionner comme d’habitude. Ils ne semblent plus avoir besoin de Dieu.
Pourtant, l’histoire contemporaine nous oblige maintenant à nous poser des questions sérieuses. Il y a quelque temps, on parlait de «la mort de Dieu»; aujourd’hui, nous parlons de «la mort de l’homme». Il y a quelques années, on proclamait «la disparition de Dieu»; aujourd’hui, on annonce «la disparition de l’homme». Ne se pourrait-il pas que ce soit la mort de Dieu qui entraîne inévitablement la mort de l’homme?
Dieu étant expulsé de nos vies, restant enfermés dans un monde créé par nous-mêmes et qui ne reflète que nos propres contradictions et misères, qui peut nous dire qui nous sommes et ce que nous voulons vraiment?
N’avons-nous pas besoin que Dieu naisse de nouveau parmi nous, qu’il jaillisse avec une lumière nouvelle dans nos consciences et qu’il se fraye un chemin à travers nos conflits et nos contradictions?
Pour rencontrer ce Dieu, nous n’avons pas besoin d’aller très loin. Il suffit de nous approcher silencieusement de nous-mêmes. Il suffit de creuser dans nos questions et nos désirs les plus profonds.
C’est le message de Noël : Dieu est proche de toi, de là où tu te trouves, pourvu que tu t’ouvres à son Mystère. Le Dieu inaccessible est devenu humain et sa mystérieuse proximité nous entoure. Dieu peut naître en chacun de nous.
Voir au-delà des apparences
Jacques Marcotte, OP
Nous sommes tout près de Noël et, comme chaque année en cette liturgie du 4e dimanche, tout devient plus concret, plus charnel, plus physique. Le mystère de la venue de Dieu en notre chair ne peut être que bouleversant. Dieu nous témoigne son amour jusqu’à s’insérer dans notre histoire et nos expériences humaines. Il ne saurait le faire sans nous surprendre, sans déroger à nos lois et habitudes.
Aujourd’hui donc un homme, Joseph, et une jeune femme, Marie, sollicitent notre attention. Ils ont le projet annoncé de s’unir en mariage. Un projet bien légitime, à vivre selon les us et coutumes de leur temps. Or voici qu’avant l’heure et de mystérieuse façon une fécondité s’annonce en Marie. Le fait est déroutant, hors norme, hors mariage, dirions-nous. De quoi mettre tout le monde mal à l’aise et rendre le fiancé inquiet et, pourquoi pas, soupçonneux. Joseph a raison d’en être troublé. Sa réputation est en jeu, celle aussi de sa fiancée. Les commérages iront bon train, c’est certain. L’honneur de Marie et de Joseph sont mis en cause. Il faudrait, à Joseph en particulier, beaucoup d’amour, de maturité et de liberté pour ne pas tout rompre. Il se montre déjà bien modéré avec son intention de renvoyer Marie en secret. En de telles matières la nuit porte conseil. Et il ne faut rien de moins à Joseph qu’un songe pour venir à bout de son inquiétude, de son hésitation, de sa peur; un songe où Dieu va lui dire ce qu’il attend de lui en cette situation délicate.
La tentation pour nous, qui lisons ce récit, c’est d’en rester là, au niveau psychologique, moral, socioculturel. Nous en aurions d’ailleurs assez pour réfléchir sur certaines situations que nous vivons, où nos réputations sont menacées par les placotages et les soupçons. Quand il faut lâcher prise et accepter de ne pas contrôler l’agenda de tout ce qui arrive; accepter de ne pas tout comprendre, de ne pas pouvoir lever telle ambiguïté où nous sommes. La façon dont les choses sont menées par Joseph est édifiante à cet égard. Même s’il souhaite d’abord tirer son épingle du jeu, il se ravise et accepte en silence le rôle que le Seigneur lui confie pour l’accomplissement des promesses. Il y a là une indication pour notre propre gouverne. La volonté de Dieu nous est manifestée en son temps pour que nous arrivions à sortir de certaines impasses où nous sommes parfois piégés. Elle nous donne de recouvrer une liberté intérieure et une marge de manœuvre dans l’obéissance de la foi. De quoi ne pas nous laisser vaincre par la peur, les règlements, les tabous, les qu’en dira-t-on.
Mais il y a encore bien plus à retenir de cet évangile: Dieu est à l’œuvre même en nos situations d’apparente catastrophe. Il nous rejoint au creux de nos interrogations et de nos perplexités. Il est fidèle jusque là. Et s’il y a toujours quelque chose de nous dans l’avancée de ses projets, c’est lui qui prend initiative et qui a le dernier mot. À nous de laisser libre cours à son influence, en acceptant de jouer le rôle qu’il attend de nous. Il saura bien nous le révéler. Rien d’ailleurs ne peut se faire avec Dieu sans quelque surprise. Chacun et chacune de nous sommes appelés à servir dans l’humilité et le silence une présence forcément dérangeante – qui est celle de l’Emmanuel – Dieu d’amour avec nous.
Cette venue merveilleuse, mystérieuse, il nous est possible de la saluer et d’y communier aujourd’hui, dans la foi, en accomplissant les rites de cette eucharistie, où se réalise pour nous – en pleine dérogation à nos lois – cette présence d’amour et de fidélité : Dieu donné, Pain de vie, Emmanuel à jamais.
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La proximité
Pape François
La liturgie d’aujourd’hui, qui est le quatrième et dernier dimanche de l’Avent, est caractérisée par le thème de la proximité, la proximité de Dieu à l’humanité. Le passage de l’Évangile (cf. Mt 1, 18-24) nous montre les deux personnes, les deux personnes qui plus que toute autre ont été touchées par ce mystère d’amour : la Vierge Marie et son époux Joseph. Mystère d’amour, mystère de proximité de Dieu avec l’humanité.
Marie est présentée à la lumière de la prophétie qui dit : « Voici que la vierge concevra et enfantera un fils » (v. 23). L’évangéliste Matthieu reconnaît que cela est arrivé en Marie, qui a conçu Jésus par l’opération du Saint Esprit (cf. v. 18). Le Fils de Dieu « vient » en son sein pour devenir homme et Elle l’accueille. Ainsi, de façon unique, Dieu s’est approché de l’être humain en prenant la chair d’une femme : Dieu s’est approché de nous et a pris chair d’une femme. Dieu s’approche aussi de nous, de façon différente, avec sa grâce pour entrer dans notre vie et nous offrir en don son Fils. Et nous que faisons-nous? Est-ce que nous l’accueillons, nous le laissons s’approcher ou bien nous le rejetons, nous l’écartons? Comme Marie, qui en s’offrant librement au Seigneur de l’histoire, lui a permis de changer le destin de l’humanité, ainsi, nous aussi, en accueillant Jésus et en cherchant à le suivre tous les jours, nous pouvons coopérer à son dessein de salut sur nous-mêmes et sur le monde. Marie nous apparaît donc comme le modèle vers lequel se tourner et le soutien sur lequel compter dans notre recherche de Dieu, dans notre proximité à Dieu, pour laisser Dieu s’approcher de nous et dans notre engagement en vue de construire la civilisation de l’amour.
L’autre protagoniste de l’Évangile d’aujourd’hui est saint Joseph. L’évangéliste met en évidence que Joseph seul ne peut s’expliquer l’événement qui est en train de se produire sous ses yeux, c’est-à-dire la grossesse de Marie. Précisément alors, dans ce moment de doute, et aussi d’angoisse, Dieu se fait proche — de lui aussi — à travers un messager et il est éclairé sur la nature de cette maternité : « Ce qui a été engendré en elle vient de l’Esprit Saint » (v. 20). Ainsi, face à l’événement extraordinaire, qui suscite certainement dans son cœur de nombreuses interrogations, il se fie totalement de Dieu qui se fait proche de lui et, suivant son invitation, ne répudie pas son épouse promise, mais la prend chez lui et épouse Marie. En accueillant Marie, Joseph accueille consciemment et avec amour Celui qui a été conçu en elle par l’œuvre admirable de Dieu, auquel rien n’est impossible. Joseph, homme humble et juste (cf. v. 19), nous enseigne à avoir toujours confiance en Dieu, qui se fait proche de nous : quand Dieu s’approche de nous, nous devons avoir confiance. Joseph nous enseigne à nous laisser conduire par Lui avec une obéissance volontaire.
Ces deux figures, Marie et Joseph, qui, les premières, ont accueilli Jésus à travers la foi, nous introduisent au mystère de Noël. Marie nous aide à nous placer dans une attitude de disponibilité pour accueillir le Fils de Dieu dans notre vie concrète, dans notre chair. Joseph nous encourage à toujours rechercher la volonté de Dieu et à la suivre avec une confiance totale. Tous les deux se sont laissés approcher par Dieu.
« Voici que la vierge concevra et enfantera un fils, et on l’appellera du nom d’Emmanuel, ce qui se traduit : “Dieu avec nous” » (Mt 1, 23). L’ange dit : « L’enfant s’appellera Emmanuel, qui signifie Dieu-avec-nous », c’est-à-dire Dieu proche de nous. Et à Dieu qui s’approche, est-ce que j’ouvre la porte — au Seigneur — quand je sens une inspiration intérieure, quand je sens qu’il me demande de faire quelque chose de plus pour les autres, quand il m’appelle à la prière? Dieu-avec-nous, Dieu qui s’approche. Cette annonce d’espérance, qui s’accomplit à Noël, accomplit l’attente de Dieu également en chacun de nous, dans toute l’Église, et dans tant de petits que le monde méprise, mais que Dieu aime et dont Dieu s’approche.
Angelus 18.12.2016
La jeune femme concevra
Marcel Domergue, SJ
Isaïe vient annoncer au roi Acaz la naissance d’un enfant alors que sa femme était jusque-là stérile. Est-ce en souvenir de cela que Matthieu raconte une annonciation à Joseph alors que chez Luc tout se passe avec Marie ? Avec Joseph, nous sommes dans une lignée royale, alors que Marie semble apparentée à une lignée sacerdotale (Élisabeth, épouse du prêtre Zacharie, est sa cousine). Le Nouveau Testament voit dans le Christ un personnage à la fois royal et sacerdotal. Mais restons-en à Matthieu. Avec lui, la «jeune femme» d’Isaïe devient une «vierge» et le nom «Dieu avec nous» (Emmanuel) devient «le Seigneur sauve» (Jésus). Ainsi, la prophétie se trouve réalisée au temps d’Acaz et accomplie, c’est-à-dire portée à un terme qui la dépasse, avec Joseph. Ce qui se passe dans le «purement humain» recèle déjà une présence active de Dieu qui ne se révélera et n’atteindra son sommet qu’à l’heure où l’homme et Dieu ne feront plus qu’un. Toute naissance d’homme est lourde de la naissance du Christ. De même, par le baptême, nous sommes déjà enfants de Dieu, mais ce que nous serons par l’achèvement de cette seconde naissance n’a pas encore été manifesté. Ainsi l’Avent ne concerne pas seulement le Christ mais aussi notre propre marche créatrice vers notre ultime venue au monde, par laquelle nous lui deviendrons semblables (1 Jean 3,2).
Les deux naissances
Ainsi, ce que nous vivons suit une sorte de règle de deux : première alliance, nouvelle alliance ; première naissance, seconde naissance… Entre les deux, un passage à vide, un temps de mort. Ainsi en va-t-il pour le Christ. Édulcoré dans la traduction du missel, le texte de notre seconde lecture fait état de deux naissances du Christ, la première «selon la chair dans la race de David», la seconde selon l’Esprit. C’est cette dernière qui le «constitue Fils de Dieu avec puissance en suite de sa résurrection d’entre les morts». Certes, on peut dire qu’il est déjà à Noël ce qu’il sera à Pâques, et cette permanence à travers le temps se vérifie pour chacun d’entre nous. Pourtant le Christ ressuscité est à la fois le même et pas le même, et c’est bien le Christ ressuscité qui est le Fils achevé, parfaite image et ressemblance du Père. Il en résulte que la naissance «selon la chair», celle du Christ et la nôtre, est anticipation et prophétie de l’homme nouveau, accompli dans le Christ à sa résurrection, encore en gestation en ce qui nous concerne. C’est pourquoi le temps de l’Avent vient raviver en nous l’attente de l’ultime venue du Christ et l’espérance de notre propre naissance à la vie plénière. Notre remise en mémoire du passé, et cela se vérifie aussi dans la célébration de l’Eucharistie, n’est pas seulement souvenir mais aussi anticipation.
L’annonce faite à Joseph
De même qu’en Genèse 1 Dieu crée l’univers à partir de rien, de même il faut que le Christ vienne au monde si l’on peut dire sans antécédents. Nouveauté absolue par rapport à la création première. La non-participation de Joseph à la conception de Jésus signifie cela, entre autres. Il fallait que le Christ ne puisse se définir uniquement par une hérédité humaine, qu’il échappe pour une part aux chaînes de nos causalités. Cela vaut d’ailleurs, dans une certaine mesure, pour tout être humain. En Jean 1, 13 il est question de «ceux qui ne sont pas nés du sang, ni d’un vouloir de chair, ni d’un vouloir d’homme, mais de Dieu». Qui sont-ils ? Non des êtres miraculeux, mais tous ceux qui ont accepté de recevoir le Verbe, de croire en lui, et cela vaut pour des hommes qui ont vécu avant le Christ. En d’autres termes, rien d’automatique, il y faut la liberté, liberté de Dieu, liberté des hommes. Joseph, comme avant lui Moïse, Élie et tant d’autres, accueille la Parole. Lui aussi, par là, naît différent de ce qu’il était. Élargissons encore : tout enfant, au-delà du processus biologique qui l’engendre, est un don, le fruit de la générosité divine, c’est-à-dire d’un amour qui surclasse celui des parents ; même si l’amour de Dieu se «matérialise» dans l’amour qui unit les humains. Le stérile engendre le fertile parce que Dieu, l’origine (nous disons le Père), fait naître quelque chose là où il n’y a rien. Tout cela est signifié par la virginité de Marie, qui vient clore et surclasser la liste biblique des maternités de femmes stériles.
Missionnaires avec la surprise du premier Noël
Romeo Ballan, mccj
Tradition deux fois millénaire, la fête de Noël n’en finit pas de nous émerveiller, -c’est au moins ce que nous souhaitons!- parce que Noël est un événement toujours nouveau, comme la première fois. C’est la fête de la vie! Qui nous ramène au jour où Dieu a choisi de se donner un visage d’homme. Pour notre bonheur, et pour notre salut! Depuis ce jour-là, aimait dire Tertullien (3° siècle), «caro salutis est cardo» (la chair de Jésus est la référence fondamentale du salut). Donc le salut de Dieu passe par le corps humain du Christ, le seul Sauveur. Nous sommes tous invités à vivre Noël dans le même émerveillement qu’ont vécu déjà les premiers protagonistes: Marie et Joseph (Évangile), les anges, les bergers, les mages. Vivre Noël dans sa vérité est un don de Dieu qui nous introduit dans la réalité des choses! C’est à dire qu’on en sort ouverts à la nouveauté des surprises de Dieu et non pas prisonniers de nos habitudes. Tout cela dépasse largement et rend insignifiants aussi bien les cadeaux que les vacances liés à la tradition de Noël. Il n’y a donc pas de place pour l’indifférence de celui qui vit dans l’aliénation des choses matérielles, ou dans l’autosuffisance de se proclamer sans foi. Loin de nous surtout la jalousie rageuse et atroce de Hérode, ainsi que la cruauté de ses successeurs de tous les temps.
Le Dieu qui vient est l’Emmanuel, qu’Isaïe avait déjà annoncé (I lecture, v. 14) et l’Évangile de Matthieu proclame maintenant le “Dieu avec nous” (v. 23). Il est le Dieu qui a choisi de se rendre présent dans l’histoire de tout homme, de marcher avec chacun de nous. Cette manière de vivre Noël, «tous surpris par un Dieu qui s’est laissé totalement investir pour nous», ne peut pas nous laisser dans l’indifférence, mais nous amènera à l’annonce missionnaire auprès de tous ceux qui ne connaissent rien encore de cette vérité. Noël est donc une manière de se donner les vraies références, pour que ce message essentiel soit partagé avec les autres. C’est ainsi que St. Daniel Comboni a vécu Noël, pèlerin à Jérusalem en 1857. Il se sentait totalement dépassé par l’immensité du mystère: “Mille fois j’ai embrassé ces lieux. J’aurais souhaité embrasser la grotte toute entière, ne pouvant pas m’en séparer…” (Écrits, n. 113).
Le même sentiment nous le retrouvons en St. Paul (II lecture), puisque depuis l’immense surprise de sa rencontre avec le Christ, il se joignit à lui pour devenir le plus ardent de ses missionnaires. Il s’exprime clairement en ces termes dans sa lettre aux chrétiens de Rome. “Moi, Paul, serviteur du Christ Jésus, apôtre par vocation, choisi pour l’annonce de l’Évangile de Dieu…” (v. 1). C’est un peu sa carte d’identité que Paul présente aux chrétiens de Rome: à juste titre il revendique pour lui des références qui forcent le respect. Il résume ses arguments autour de trois mots: serviteur, apôtre, choisi. Il est d’abord serviteurdu Christ Jésus: heureux de se sentir investi par lui. Il l’aime profondément, il ne parle que de lui, tout le temps. Il se réfère à lui quatre fois, rien que dans les premiers versets. Il a ensuite conscience d’être apôtre, donc envoyé: la mission n’est pas née avec lui et ne dépend pas de lui, mais elle lui vient de quelqu’un qui lui est supérieur et dont lui, Paul, n’est que serviteur. Et finalement Paul considère une grâce le fait d’être apôtre, choisi “pour amener tous les gens à l’obéissance de la foi” (v. 5). La mission est un don, avant d’être une tâche à accomplir. C’est un charisme qui enrichit d’abord celui qui le reçoit, et le rend apte à servir, au sein de la communauté.
Paul revient souvent sur ces trois titres dans ses lettres, il en fait sans cesse le commentaire. Il se sent missionnaire du Christ dans toute la richesse surprenante de son mystère. Jésus est celui qui a été promis par l’intermédiaire des Prophètes, qui est né à la vie d’homme dans la descendance de David, proclamé définitivement Fils de Dieu parce que ressuscité des morts… (v. 2-4). Paul a senti que le Christ l’a reconnu et choisi, aimé, sauvé, envoyé auprès des gens païens pour leur annoncer “les richesses insondables du Christ” (Éph 3,8). Ce n’est pas seulement le Paul chrétien qui est né sur la route de Damas, mais aussi le Paul apôtre et missionnaire. Il n’a pas changé de vie par une décision d’ordre éthique, un choix de sa libre volonté, et surtout pas pour suivre une idéologie à la mode, mais pour la seule raison qu’il avait rencontré le Christ, et que celui-ci avait changé totalement sa vie, lui ouvrant l’intelligence à de nouveaux horizons. (*) Paul est un exemple pour tout chrétien et pour tout missionnaire! Cette année aussi Noël nécessite de nouveaux messagers pour atteindre ceux qui sont lointains et ne le savent toujours pas, ou ceux qui se sont éloignés, ou ceux qui se sont trompés de route. Ici, près de nous, ou loin. Une tâche de toute urgence, qui sera passionnante! Nous y sommes tous conviés!