3ème Dimanche de Carême – Année C
Luc 13,1-9
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Références bibliques :
- Lecture du livre de l’Exode : 3. 1 à 15 : “J’ai vu la misère de mon peuple.”
- Psaume 102 : « Le Seigneur est tendresse et pitié, lent à la colère et plein d’amour. »
- Lettre de saint Paul aux Corinthiens : 10. 1 à 12 : “Destinés à nous servir d’exemple pour nous empêcher de désirer le mal.”
- Evangile selon saint Luc : 13. 1 à 9 : Peut-être donnera-t-il du fruit dans l’avenir ?”
Evangile de Jésus Christ selon saint Luc, Lc 13, 1-9
Un jour, des gens vinrent rapporter à Jésus l’affaire des Galiléens que Pilate avait fait massacrer pendant qu’ils offraient un sacrifice.
Jésus leur répondit : « Pensez-vous que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens, pour avoir subi un tel sort ? Eh bien non, je vous le dis ; et si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous comme eux.
Et ces dix-huit personnes tuées par la chute de la tour de Siloé, pensez-vous qu’elles étaient plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem ? Eh bien non, je vous le dis ; et si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de la même manière.»
Jésus leur disait encore cette parabole : « Un homme avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint chercher du fruit sur ce figuier, et n’en trouva pas. Il dit alors à son vigneron : ‘Voilà trois ans que je viens chercher du fruit sur ce figuier, et je n’en trouve pas. Coupe-le. A quoi bon le laisser épuiser le sol ?’
Mais le vigneron lui répondit : ‘Seigneur, laisse-le encore cette année, le temps que je bêche autour pour y mettre du fumier. Peut-être donnera-t-il du fruit à l’avenir. Sinon, tu le couperas.’ »
Dieu est innocent du mal que nous faisons
Marcel Domergue, sj
Malgré le livre de Job et bien d’autres passages de la Bible, les Hébreux liaient facilement le malheur au péché. Il est rassurant, quand on est témoin d’une catastrophe, de pouvoir dire des victimes : « Ils ne l’ont pas volé ». L’image du Dieu punisseur n’a pas totalement disparu de nos mentalités, et l’on entend encore des parents dire à leur enfant coupable d’une sottise : « Le bon Dieu te punira ». Eh bien non ! Dieu ne punit pas, il ne provoque en aucune façon le mal qui nous afflige. Genèse 1 nous dit qu’à la fin de la création, « il vit que cela était bon ». Mais, toujours dans le même chapitre, nous lisons que cet univers est confié à l’homme pour qu’il le domine, le gère, l’humanise. Dieu ne pouvait-il pas l’humaniser d’entrée de jeu ? Non, car alors il n’aurait pas été à l’image et ressemblance de Dieu. Pour cela, il faut qu’il soit lui aussi créateur. Seulement voilà : toujours pour être image de Dieu, c’est librement que l’homme fait de bonnes choses ; nous ne pouvions être condamnés, forcés, à « faire le bien ». C’est Pilate, et non pas Dieu, qui a choisi le mal et la mort en faisant massacrer les Galiléens en train d’offrir un sacrifice. C’est son péché qui est à l’origine du drame, non celui des victimes. La volonté de Dieu est de faire vivre et non de faire mourir. Réfractaires à la vérité qui déclare que tout dans le monde est soumis à l’homme, certains se demandent pourquoi Dieu a « permis » cela. Dieu n’a rien permis du tout, ni rien interdit ; il a simplement prescrit l’amour par lequel nous parvenons à sa ressemblance. La justice de Dieu n’est pas ce que nous pensons. Pour nous justifier, il faudra qu’un juste donne sa vie et subisse ainsi le sort du coupable. Injustice excessive à laquelle le Fils, parfaite image du Père, souscrira : Dieu n’a pas voulu se ranger parmi nos meurtriers mais parmi leurs victimes.
L’homme en conflit
Il n’y a pas que les maux dont nous sommes responsables. Il y a aussi les tremblements de terre, les inondations, les accidents. De nos jours, on cherche toujours une défaillance humaine à la source des sinistres. Mais on se trouve souvent devant l’imprévisible et l’impossibilité de désigner des responsables. Alors, Dieu ? La Bible voit les choses autrement. Au chapitre 3 de la Genèse, Dieu constate que le péché de l’homme, sa volonté de décider par lui-même ce qui est bon et ce qui est mauvais, l’a mis dans un conflit multiforme : conflit entre l’homme et la femme (3,16) ; conflit entre l’homme et la nature (3,17-19) ; conflit entre l’homme et l’homme (4,9…). Ces diverses oppositions vont courir à travers toute la Bible, jusqu’au jour où le maître se placera, à la Croix, dans la situation de l’esclave. Alors Paul pourra écrire : Il n’y a plus (du point de vue du statut social) ni homme ni femme, ni esclave ni homme libre, ni juif ni païen… Il n’y a plus que le Christ qui est tout en tous. C’est qu’il y a un autre conflit, plus fondamental, que Genèse 3 symbolise par l’image de l’hostilité entre la descendance de la femme et le serpent, figure du mal. Cette descendance, c’est, à l’horizon, le Christ, le « Fils de l’homme ». Il se fera serpent (Jean 3,14) pour que le mal de l’homme soit crucifié.
L’injustice de Dieu
Mais que veut nous faire comprendre Jésus quand il dit : « Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de la même manière » ? Ne revenons-nous pas à l’idée d’une punition divine ? Pas du tout ! Nous convertir signifie : aller vers notre vérité d’hommes, nous humaniser. En dehors de cela, il n’y a pour nous que le néant. Ou nous sommes image et ressemblance de Dieu, ou nous ne sommes rien, promis à la mort. Seul l’amour, par lequel nous ressemblons à Dieu, peut nous faire franchir cette mort. C’est donc à l’amour que nous avons à nous convertir, cet amour qui nous fait surmonter les divisions et les conflits. C’est cet amour qui a conduit le Christ à se soumettre à la mort qui nous attend tous, solidaires que nous sommes, de diverses façons, du mal, l’anti-amour qui empoisonne le monde. Mais voilà, lui est le seul juste, le seul qui n’était pas promis à la mort. Le seul en accord avec la nature et avec ses semblables (c’est là un des sens des guérisons et autres « signes »).
Par lui, crucifié, nous sommes mis sous le régime de l’injustice de Dieu, cette injustice qui fait donner la même somme à l’ouvrier de la dernière heure qu’à celui qui est au travail depuis le matin. Selon la logique de la justice, nous devrions tous « périr de la même manière ». Mais, sur le chemin de notre mort, nous rencontrons le Christ crucifié. Il franchit la mort et, parce qu’il s’est fait solidaire de nous dans notre destin de pécheurs, nous sommes solidaires de lui dans sa résurrection. Du côté de l’homme, il est impossible d’entrer dans le royaume de Dieu. Mais ce qui est impossible à l’homme est possible à Dieu (Luc, 18,27). La patience du vigneron vis-à-vis du sarment stérile est inépuisable.
L’urgence de se convertir !
Jacques Marcotte, op
Des tragédies. Des accidents. Il en arrive souvent. Nous apprenons les faits presqu’en temps réel. Les médias nous informent rapidement. Les questions viennent vite aussi : Pourquoi? Pourquoi eux? Pourquoi pas moi? Les tragédies humaines, les massacres, les calamités, les catastrophes naturelles, tous ces malheurs ont-ils un sens? Comment les expliquer? Comment comprendre?
On se dit que c’est peut-être une punition du Bon Dieu, un châtiment de sa part. Mettre le mal sur le dos du Seigneur, c’est facile! On le dit comme ça. Et nous nous imaginons alors un Dieu sévère, vengeur, punisseur, cruel.
Jésus pourtant, alors même qu’il évoque des faits réels pleins d’horreur, nous détourne nettement d’une conclusion qui mettrait la faute ou la responsabilité sur Dieu. « Pensez-vous, dit-il, que ces gens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres, plus coupables, pour connaître un tel sort? » Et il s’empresse de donner la réponse : « Je vous dis : Pas du tout. » Il le déclare et le répète avec fermeté et insistance.
Seulement, il ajoute avec gravité, à deux reprises : « Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même ». En voulant dire : la soudaineté des accidents ou des tragédies qui arrivent, et qui vous ébranlent, devrait vous inciter à vous convertir, à ne pas attendre, à y penser sérieusement. Ce dont Jésus veut nous parler alors c’est d’une conversion salutaire, de tourner notre cœur et notre esprit vers Dieu. Nous savoir en confiance avec lui, l’accueillir dans notre vie. Ne pas attendre. Ne pas nous attarder loin de lui, dans un monde où règnent l’injustice, l’égoïsme, l’orgueil. Ce serait choisir la perdition, le malheur, la mort. Ce n’est pas ce à quoi il nous a destinés!
Nous convertir! Peut-être que ça nous fait peur, que ça nous paraît compliqué, difficile, hors de notre portée, trop exigeant. Et pourtant il ne s’agit pas d’abord de mener une vie impeccable, 100% pure, ni d’afficher une sainteté mur à mur. Ceci n’est pas exclu, bien sûr, mais ce n’est pas là l’essentiel de la conversion qui nous est d’abord demandée. C’en est le résultat, l’effet à long terme!
La conversion commence par le cœur, par notre bonne volonté d’abord. Nous nous tournons vers plus grand que nous, vers ce Dieu qui demande à nous parler, à se faire proche. Se convertir, c’est ouvrir son cœur, ses oreilles et ses yeux, c’est se jeter dans les bras d’un Père, c’est accueillir Jésus comme son envoyé. Le reste viendra à son heure, au rythme et selon les capacités de chacun, de chacune. La conversion, ce n’est pas d’abord des mérites, des performances morales. C’est d’abord un abandon, un retournement du cœur, un amour qui nait et grandit, et change tout de notre vie. C’est l’effet d’un coup de foudre!
Le Seigneur nous rappelle aujourd’hui qu’il n’est pas trop tard pour nous convertir. Nous pouvons compter sur sa compassion, son aide. Dieu nous attend et nous facilite les choses. Il est Dieu de tendresse et d’amour, Dieu de patience et de miséricorde. Il veut notre bonheur et notre joie, il rêve d’une fidélité partagée avec nous, entre nous.
Le grand témoin de l’amour et de la patience de Dieu, n’est-ce pas Jésus de Nazareth? En lui, Dieu s’est mis pour toujours à notre portée; il nous a pris par la main, nous a réappris à marcher, nous initiant aux valeurs du monde nouveau. La mort et la résurrection de Jésus nous donnent la preuve de l’amour extrême dont nous sommes aimés. En réalité, c’est Pâques qui fonde et justifie notre conversion et lui donne de porter du fruit pour le Royaume qui vient.
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Le commentaire du P. Jacques Fournier
ECOUTE L’AVEU DE NOS FAIBLESSES.
A la parole de Dieu au buisson qui brûle sans tomber en cendres (signe de la permanence de Dieu, de son incorruptibilité, de son éternité), Moïse répondit :”Qui suis-je, Seigneur, pour aller rencontrer le Pharaon ?” Le Seigneur nous donne sa réponse qui est celle de la foi qui nous est demandée :” Je serai avec toi.” (Genèse 3. 11 et 12)
Saint Paul met en garde les Corinthiens :” Celui qui se croit solide, qu’il fasse attention à ne pas tomber.” (1 Cor. 12) Si notre confiance ne repose que sur nos seules forces, nous avons toute chance qu’elles n’arrivent pas à nous apporter les solutions. Ce n’est pas nous qui pouvons décider des événements à venir qui interviendront par delà nos souhaits et nos désirs. Nous sommes souvent incapables de tenir seuls devant eux.
Et Jésus rappelle à ses auditeurs qu’ils ne sont pas meilleurs que les autres :”Pensez-vous que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens. ?” Luc 13. 2)
Ce que le Christ nous demande, c’est d’avoir l’humble et réaliste conscience que nous sommes pécheurs. C’est de reconnaître cette vérité et le dire : « nous commettons le péché. »
TU NOUS AS DIT COMMENT GUERIR DU PECHE
Pour cela il est nécessaire de relire l’histoire de nos pères dans la foi afin de tirer de leur expérience comment qu’ils ont vécu avec Dieu et en Dieu, c’est-à-dire sa tendresse et son exigence.
Sa tendresse
”J’ai entendu ses cris… je connais ses souffrances… je suis descendu pour le délivrer.” (Genèse 3. 7 et 8) Mais Dieu n’agit jamais sans la libre collaboration de l’homme. Il lui faut l’action de Moïse, jointe à la sienne : “Je t’envoie chez Pharaon; tu feras sortir d’Egypte mon peuple.” (Genèse 3. 10)
Si nous lisons ainsi le passé pour en tirer un profit présent, nous ne serons pas pris au dépourvu :”Ces événements étaient destinés à nous servir d’exemple.” (Corinthiens 10. 11) Le grec de saint Luc est plus précis : ces événements sont “typiques” pour nous. “Typicos”, caractéristiques de ce qui nous arrive à nous aussi.
Et le Christ exprime la tendresse de Dieu par la conclusion de la parabole du figuier stérile : “Laisse-le encore cette année… peut-être donnera-t-il du fruit à l’avenir ? (Luc 13. 9) Dieu est patient.
Son exigence.
Patient mais exigeant. Jésus le rappelle à ses auditeurs à l’occasion de deux événements d’actualité, comme il leur rappelle ce que Dieu attend d’eux. Ces événements les concernent par ce qu’il signifient pour eux. Ils n’ont pas à les interpréter pour les autres.
Il leur dit en effet, à vos yeux, ils sont pécheurs à vos yeux. En fait, Pas plus que vous. Ne jugez pas. Vous avez à faire pénitence, ou plus exactement, à retourner votre conduite dans un tout autre sens. Là encore saint Luc est précis. Il emploie le verbe “metanoieiv”, que nous traduisons par “convertissez-vous.” Entendons-le même si c’est d’une manière imagée, au sens des skieurs. “Faire une conversion”, c’est déplacer le sens de ses skis, en faire un retournement, pour prendre une direction tout à fait différente…
Des malheurs à la conversion du cœur
Romeo Ballan, mccj
Les victimes des Tours jumelles, des gares de Madrid et de Londres, du tsunami asiatique, du cyclone X, du énième accident dans la nuit du samedi, Auschwitz et Hiroshima… Et encore toutes les victimes d’attentats, massacres, accidents en tout genre, catastrophes, violence, esclavage, cancers, épidémies, sida… A qui la faute de tout cela? Dieu, est-il en cause? et qu’en pense-t-il? Quelle est l’interprétation que Jésus donne à des événements de ce genre? Voici quelques uns des questionnements qui nous habitent quand on est affronté à ce genre de malheurs. Et voici que Jésus se montre attentif et informé sur les événements d’actualité en son temps (Evangile): il y réfléchit, porte sur ces événements un avis personnel, loin de la mentalité courante. Son analyse est critique et son commentaire est incommode, à contre-courant. Aujourd’hui on dirait qu’il n’est pas conforme au ‘politiquement correct’.
Ses adversaires voulaient l’entraîner dans une polémique publique contre Pilate, coupable d’un geste sans doute sanguinaire, qui en plus était un sacrilège à l’égard du Temple (v. 1). Jésus réfléchit sur ce fait, ainsi que sur la mort de dix-huit personnes sous l’effondrement de la tour de Siloé. Son interprétation va beaucoup plus loin de l’opinion que pratiquement tout le monde partageait en son temps: Jésus lit dans ces événements une invitation de Dieu à un changement de vie pour ne pas périr tous de la même manière (v. 3.5). Il y avait une double tentation possible: concernant le cas de Pilate, on pouvait se croire facilement autorisés à la rébellion pour arriver même à évincer le procureur romain; pour les victimes de la tour on pouvait tout aussi facilement penser à une vengeance de quelqu’un, ou à un châtiment pour un péché. Il s’agit là de la réaction plus facile et donc plus fréquente: la faute est aux autres, le mal est toujours extérieur à notre conscience. D’où la tendance à attribuer à un châtiment divin toute sorte de malheurs ou maladies. Voilà la mentalité païenne, que les missionnaires constatent souvent dans des milieux non-chrétiens, mais fréquente aussi auprès de chrétiens qui ne sont pas encore vraiment convertis.
Jésus veut nous libérer de deux risques différents: d’un côté, il nous met en garde contre une mentalité courante qui prône le fatalisme et la passivité, ce qui nous empêche de démasquer les vraies causes des maux qui nous affligent; mais en même temps Jésus se refuse à une fausse idée d’un Dieu père fouettard. Jésus veut aller à la racine des problèmes, ainsi que des changements possibles: il nous invite à nous convertir, à changer notre cœur pour que la réalité évolue positivement. La situation s’améliorera dans la mesure où les personnes changeront intérieurement. C’est la seule condition qui permettra une amélioration des structures humaines, religieuses, sociales et politiques. Voici donc la bonne nouvelle, qui est aussi une nouveauté: c’est l’Evangile qui change la mentalité, le cœur, la vie. Le commentaire de Jésus sur l’actualité de son temps n’est pas du tout une évasion, mais une lecture plus profonde. L’Evangile ne marche pas sur les bas-côtés de l’histoire pour se limiter à l’effleurer, mais il pénètre la réalité et atteint la conscience des personnes: c’est là que Dieu construit son Royaume d’amour et de liberté. “Le Royaume de Dieu n’est pas une réalité qui marche parallèlement à l’histoire, mais l’interpelle et l’interprète” (Gustavo Gutiérrez).
Affrontés à des faits douloureux et atroces, nous sommes tentés de nous demander: où était Dieu à ce moment-là, avec toute sa puissance? Seulement on oublie toute la place réservée à la liberté et à la responsabilité que Dieu a confiées à l’homme. Hermès Ronchi essaie cette réponse: “Où était Dieu? Non! Demandons-nous plutôt: où était l’homme ce jour-là? Si l’homme ne change pas, s’il n’entreprend pas de nouveaux chemins, s’il ne se convertit pas pour devenir constructeur d’alliance et de liberté, la terre tombera en ruine, parce qu’elle est fondée sur la violence et sur l’injustice. Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous comme eux”. Voilà donc pourquoi Dieu est miséricordieux et patient à notre égard: il nous fait don du temps, comme réalité où le salut se rend accessible. Et en plus il y ajoute un temps supplémentaire, “cette année encore”, pour porter du fruit. Sans quoi on finit à la fin par perdre tout contact (v. 7-9). Le Seigneur est patient, mais “les pauvres ne peuvent pas attendre”, dit la campagne missionnaire pour les objectifs du Millénaire; nous n’avons plus le droit de les faire attendre encore. Le carême nous rappelle cette solidarité avec tous ceux qui souffrent. (*)
Que l’expérience du peuple d’Israël, nous dit Paul (II lecture), soit pour nous un exemple et un avertissement (v. 6.11): tous ils ont été témoins et ont eu part aux prodiges innombrables que Dieu a accomplis pour eux, pourtant beaucoup n’ont pas su répondre aux attentes de Dieu, et ainsi ils ont connu la perdition (v. 5). L’avertissement est évident: nous n’avons pas le droit de nous bercer dans les illusions de nos mérites présumés, mais nous devons témoigner humblement en cohérence de vie (v. 12), toujours confiant dans le Seigneur, qui aime et libère son peuple. C’est aussi le sens de l’autorévélation de Dieu se manifestant à Moïse sous le signe du buisson qui brûlait sans se consumer (I lecture): il est Dieu de la vie, Dieu des ancêtres (v. 6), Dieu qui voit la misère de son peuple, entend ses cris, connaît ses souffrances et se rend proche de lui pour le libérer (v. 7-8). Il est Celui qui est (v. 14), Dieu présent toujours, en tout lieu, pour tous les hommes. L’Emmanuel. Une présence qui crée et libère. Le fort engagement pour l’évangélisation est toujours né dans le cœur des missionnaires, comme déjà pour Moïse (v. 4s), d’une profonde expérience de Dieu. Mais aussi, et en même temps, de l’implication personnelle dans les souffrances du peuple. C’est le chemin qu’ont parcouru St. François Xavier, Pierre Chanel, Daniel Comboni, Françoise Xavier Cabrini, Thérèse de Calcutta…