« De nombreuses communautés de base centrent sur la Bible leurs réunions et se proposent un triple objectif : connaître la Bible, construire la communauté et servir le peuple. Ici aussi l’aide des exégètes est utile pour éviter des actualisations mal fondées. Mais il y a lieu de se réjouir de voir la Bible prise en mains par d’humbles gens, des pauvres qui peuvent apporter à son interprétation et à son actualisation une lumière plus pénétrante, du point de vue spirituel et existentiel, que celle qui vient d’une science sûre d’elle-même (cf Mt 11,25) » (Commission Biblique Pontificale, L’interprétation de la Bible dans l’Eglise, IV C 3)
METHODE DE KIGALI
Cette méthode a trouvée sa systématisation définitive en 1987, pendant une rencontre nationale de catéchistes à Kigali (Rwanda), ville d’où elle prend son nom. Elle a été créée pour favoriser la lecture de la Bible dans des groupes de catéchistes. Et elle a été progressivement mise en pratique et élaborée le long de plusieurs sessions.
La méthode a été conçue principalement pour la lecture et la réflexion des textes narratifs du Nouveau Testament (Evangiles et Actes des Apôtres). Au début on l’a utilisé pour saisir et actualiser l’expérience de foi de la première communauté chrétienne, présente dans ces livres. Cependant, elle peut aussi être utilisée pour d’autres livres soit de Nouveau que de l’Ancien Testament. Comme nous le verrons en expliquant les étapes qui la composent, elle accorde beaucoup d’attention au texte. Une lecture superficielle ne suffit pas. Il faut entrer dans le passage biblique choisi, chercher et observer avec attention tous les détails. Cela nous guidera vers l’expérience de foi présente dans l’histoire. Nous entrons en contact avec le passage quand nous le lisons ou l’écoutons. Mais il faut ensuite le parcourir attentivement de début à la fin. En le connaissant mieux le meilleur, il laissera une trace. On peut aussi recourir aux informations des experts, qui enrichiront les premières impressions. Après tout ce parcours il sera plus simple de trouver le sens que le passage a pour nous aujourd’hui.
4.1 ITINÉRAIRE
Cette méthode propose un itinéraire en cinq étapes, qui commence par la préparation et termine avec une conclusion.
Préparation
Pour bien écouter la Parole de Dieu, on commence par un moment de silence, une prière ou un chant qu’il invite à l’écoute attentive de la Parole.
Première étape : Premier contact avec le texte
Une fois qu’on a créé le climat propice pour l’écoute, un membre du groupe lit à haute voix et clairement le passage biblique choisi pour la réunion.
Après quelques secondes de silence, on lit une deuxième le même passage.
Même si chacun a sa Bible, cette répétition est très nécessaire, ainsi se manifestent clairement la dimension communautaire de la lecture et l’exigence d’une écoute respectueuse de la Parole.
Ensuite chacun communique ses impressions : ce qu’il a aimé ou ce qu’il n’a pas aimé, ce qui l’a surpris, ce qui lui déplaît, ce qui attire son attention…
Si nous prenons, par exemple, la résurrection du fils de la veuve de Naim (Lc 7,11-17), l’attention de certains peut être attirée par le fait que Jésus, en voyant la veuve en larme, ait compassion d’elle ; d’autres seront frappés par Jésus, qui sans que personne ne le lui demande ressuscite ce jeune ; ou bien d’autres seront surpris que Jésus n’hésite pas à toucher le cercueil…
Deuxième étape : Scruter le passage biblique
Il est nécessaire avoir une attitude réceptive devant le texte que nous lisons et l’accepter comme il est. Ce n’est pas un miroir qui me restitue mon image, ou ce que je m’aimerais voir en lui. Il faut bien s’enraciner la lettre. Le texte est le centre de mon observation et de mon apprentissage. Il ne faudrait pas dire à la moitié de la réunion : « Ah, je croyais qu’il disait…. ». C’est pourquoi, avant de tirer des conclusions précipitées et purement subjectives, nous l’observons en détail.
Voici quelques indications pour aider à scruter le texte :
Localiser les lieux qui sont nommé : où se déroule l’action (dans la maison, au temple, à la campagne, etc..) ?
Découvrir les personnages et leurs relations : qui paraît être le personnage principal ? Que dit-il ? Que fait-il ? Qui est avec lui ? Qui est contre lui ?
Grouper les mots du texte qui sont la même famille et qui se réfèrent au même sujet. Si nous nous prenons, par exemple, l’épisode de la résurrection du fils de la veuve de Naín nous trouvons ces verbes de mouvement : « il s’est allé » ; « ils ont été trouvés » ; « ils portaient » ; « en s’approchant » ; « ils ont été arrêtés » ; « lève-toi ». – Regarder avec beaucoup d’attention le début et la fin du passage : que se passe-t-il quelle transformation est y a-t-il entre le début et la fin ? Dans ce même exemple la transformation est claire : décès-vie, silence-louange…
Troisième étape : Profiter des informations sur le texte
Les informations données par les experts peuvent clarifier le passage, en évitant de tomber dans de faciles subjectivismes ou des erreurs d’appréciation. En lisant les notes de la Bible et d’autres passages parallèles, il faut essayer de découvrir le genre littéraire, la référence à d’autres textes et la signification des mots quand ils ont été écrits. Il est aussi utile de se servir d’un commentaire ou d’un dictionnaire bibliques. Cette troisième étape voudrait servir d’appui dans notre connaissance du passage pour sa meilleure compréhension. En reprenant l’exemple du miracle que raconte Lc 7,11-17, dans les notes de la Bible on peut trouver la référence à deux autres miracles semblables de l’Ancien Testament : celui d’Elie et le fils de la veuve de Sarepta (1Re 17,17-24), et celui d’Elisée (2Re 4,1-5.19).
Quatrième étape : Questionner le texte
Les Evangiles ont été écrits après Pâque par des croyants et pour des croyants. D’une manière ou d’une autre, ils présentent quatre points fondamentaux : la vie de Jésus de Nazareth, la Résurrection, la vie de l’Église et les Écritures. Pour saisir ce message original nous devons nous questionner sur :
L’événement de la vie Jésus (ou de ses disciples) dont parle le passage.
La foi au Christ ressuscité qui s’exprime, explicitement ou implicitement, dans ce passage concret qu’il a été lu, et l’espérance qu’il suscite.
La vie de l’Église qui est sous-jacente : à quelles nécessités des chrétiens essaye de répondre le texte ? A quel moment la communauté se trouvait-elle quand il a été écrit ? Pourquoi a-t-on conservé ce texte ?
Les allusions directes ou indirectes à d’autres passages de l’Ancien Testament. L’Ancien Testament a été lu et compris à la lumière de la Pâque, aidant ainsi à comprendre les événements du Nouveau Testament.
Variante de la quatrième étape.
Si le passage choisi pour la réunion n’est pas du Nouveau, mais de l’Ancien Testament, il faut quelques changements dans l’analyse. Dans ce cas nous devons chercher des informations plus précises sur l’histoire de l’Israël, ou à propos de l’événement que raconte le passage choisi.
Il faudra réfléchir pour trouver quelle est la foi dans le Dieu libérateur qui est exprimé clairement, ou de manière voilée, dans ce passage. Il faudra découvrir l’expérience qu’il y a derrière le texte, en nous demandant : pour quelles nécessités des croyants a-t-on écrit et a-t-il conservé ce texte ? Il ne sera pas difficile de trouver dans le passage des allusions, directes ou indirectes, à d’autres passages de l’Ancien Testament.
Cinquième étape : Actualiser le texte biblique
Après avoir franchis les quatre premières étapes pas, il s’agit, maintenant de découvrir le témoignage de foi qui émerge du texte, la Bonnes Nouvelles qu’il nous apporte. Pour cela nous pouvons nous servir de questions comme celles-ci :
Comment ce témoignage de foi (cette Bonne Nouvelle) peut illuminer notre foi et nous aider dans notre situation, aujourd’hui?
Comment traduire en d’autres mots le message de cet ancien texte pour qu’il soit compris par les personnes qui nous entourent?
Après avoir parcouru ce chemin il convient de retourner sur les impressions suscitées par le texte lors de la première étape pour voir si je dois les compléter, les corriger ou les abandonner.
Conclusion
A la fin de ce parcours, je me demande : quelle prière m’inspire maintenant ce passage ? Ainsi la rencontre terminera par une prière à partir du message découvert.
4.2 SCHÉMA DE L’ITINÉRAIRE
Prière ou chant
- On commence par une prière ou un chant.
Première étape: contact avec le texte
- Un lit en haute voix le passage choisi.
- Une minute de silence.
- On lit à haute voix le même passage pour la deuxième fois.
- Méditation personnelle pour souligner ce qui touche davantage chacun.
- Partage de ces impressions.
Deuxième étape : Scruter le texte
- Comprendre le texte : lieux, personnages, mots, réactions, transformations, contrastes…
- Partager ce qui est étudié.
Troisième étape : profiter des informations hors du texte
- On lit les notes de la Bible et on cherche des textes parallèles.
- Partager avec le groupe les nouvelles découvertes.
Quatrième étape: questionner le texte
- Quel est le message original ?
- Quelle foi manifeste-t-il dans la résurrection du Christ?
- Qu’essaye-t-il de dire aux premiers chrétiens?
- Quelles sont les références à l’A.T. ?
Cinquième étape : nous cherchons le sens pour nous aujourd’hui
- Comment le texte illumine-t-il ma foi ?
- Comment transmettre aujourd’hui ce message ?
Conclusion
- Prière