« De nombreuses communautés de base centrent sur la Bible leurs réunions et se proposent un triple objectif : connaître la Bible, construire la communauté et servir le peuple. Ici aussi l’aide des exégètes est utile pour éviter des actualisations mal fondées. Mais il y a lieu de se réjouir de voir la Bible prise en mains par d’humbles gens, des pauvres qui peuvent apporter à son interprétation et à son actualisation une lumière plus pénétrante, du point de vue spirituel et existentiel, que celle qui vient d’une science sûre d’elle-même (cf Mt 11,25) » (Commission Biblique Pontificale, L’interprétation de la Bible dans l’Eglise, IV C 3)

La Lecture familière a été proposée par le Service Biblique Evangile et Vie de Paris, avec l’intention d’offrir un itinéraire simple pour faire de manière concrète la Lectio divine. Le mot « familière » doit précisément être compris dans le sens de proche, accessible, dépourvue des complications propres d’une approche érudite à la Parole de Dieu. Une lecture que nous familiarise peu à peu avec la Bible, plus par la simplicité que par la profondeur de l’étude.

La Lecture familière se présente comme une méthode pour lire l’Écriture régulièrement (si possible chaque jour), et par conséquence paraît suggérer une lecture privée ; cela n’empêche pas que l’itinéraire proposé soit valide aussi pour des groupes de lecture biblique. L’application idéale de la méthode prévoit, en réalité, la lecture personnelle et des rencontres périodiques, pour partager avec d’autre les acquis de la lecture personnelle.

2.1 ITINÉRAIRE

L’itinéraire proposé suit les trois premières étapes de la Lectio divina dans sa formulation classique (lectio – meditatio – oratio) et offre des pistes simples, mais suggestives, pour orienter la lecture du texte et la méditation.

Première étape : La lecture

Préparation : On commence toujours par une courte prière de demande ou de louange pour nous disposer à faire une lecture croyante de l’Écriture. Si on préfère, on peut aussi commencer en lisant un psaume, ou simplement en faisant un moment de silence, qui nous aide à prendre conscience de ce que nous allons faire. Ce qui importe c’est de réaliser la « rupture » indispensable avec le rythme de la vie ordinaire qui permet aux participants de se mettre dès le début à l’écoute du message ou du témoignage de foi qui va être livré par le texte, puisque c’est cela ce qu’en réalité est recherché. Par exemple, si nous lisons le passage de Gn 1,1-31 nous pouvons commencer en lisant le psaume 8, ou en formulant une prière spontanée pour demander au Seigneur de nous aider à découvrir, à travers sa Parole, sa présence au milieu des choses créées par Lui.

Première lecture : Après cette préparation nous lisons le texte choisi, lentement et, si possible, à haute voix (même dans le cas de la lecture privée), puisque cela confère à la lecture une dimension particulière qui aide aussi à concentrer l’attention et à faciliter la compréhension. À ce point il faut se laisser porter par ce qu’on lit, sans s’arrêter pour résoudre les difficultés qui peuvent apparaître. Il faut lire jusqu’à la fin sans se poser de questions. Pour le moment nous nous concentrons seulement sur le texte biblique, en faisant abstraction des titres, des sous-titres et des notes.

Deuxième lecture. Ensuite chacun lit de nouveau personnellement le texte et consulte les notes de la Bible qui s’y réfèrent. Bien que cette méthode ne prétende en aucune manière, être comparée à une étude de l’Écriture, il n’est pas déconseillé qu’en cette étape, on puisse graduellement utiliser quelques ouvrages simples qui nous aident à comprendre le sens du passage lu : cartes, introductions accessibles, dictionnaires bibliques de base… pourvu que nous n’employions pas en cela trop de temps, ni que nous transformions la Lecture familière en ce qu’on ne veut pas qu’elle soit, a savoir : une étude érudite. En réalité il suffirait de disposer d’une bonne édition de la Bible, dotée d’introductions et de notes adéquates qui nous aident à faire ce simple, mais fondamental, travail d’”étude”. On peut aussi consacrer un peu de temps pour mémoriser quelques expressions, Paroles, noms de personnages ou de lieux, parce que cela sera très utile et nous servira pour nous familiariser peu à peu avec le monde de la Bible.

Deuxième étape : La méditation

Par la méditation, on cherche surtout à comprendre le message de foi du texte et l’appliquer à notre propre vie. La méditation se réalise en deux étapes successives :

Recherche du témoignage de foi

Il s’agit de chercher le témoignage ou l’expérience de foi qui se reflète dans le passage que nous lisons, en essayant de formuler de manière simple les convictions de base qui apparaissent dans le texte. Pour cela nous pouvons nous aider avec les questions suivantes :

Qu’est-ce qui m’a spécialement frappé dans ce passage ? Qu’elles paroles ? Quelles expressions ?

Quelles sont, à mon avis, les expériences ou les convictions de foi qui sont exprimées dans le texte ?

– Quelle relation a ce texte avec certains des grands thèmes théologiques de la Bible ? Ce texte me rappelle-t-il quelque autre texte de l’Écriture ?

– S’il s’agit d’un passage de l’AT, comment Jésus aurait-il prié avec ce texte ? Quelle relation a-t-il avec sa prédication ?

– S’il s’agit d’un texte du NT : comment exprime-t-il la foi en Jésus-Christ, le Seigneur ?

Si, par exemple, nous lisons Gn 1,1-31, il se peut que nous soyons touchés par la solennité, et la simplicité grandiose avec laquelle apparaissent, à partir du chaos originaire, toutes les choses selon l’ordre et l’harmonie dont Dieu les appelle à l’existence par sa Parole. Nous remarquerons sûrement comment, après chaque jour de la Création, on répète comme un refrain la phrase : « Et Dieu vit que cela était bon ». Si l’on insiste tellement sur cela c’est parce qu’on veut sûrement rappeler quelque chose de très important : à savoir que tout ce que Dieu a créé est par nature bon et que, si le mal existe sur la terre, ce n’est pas son œuvre. Évidemment, attireront notre attention les versets consacrés à la création de l’homme, car de lui – de l’homme et de la femme – on dit des choses qu’on affirme d’aucune autre créature. Sa dignité exclusive dépend du fait d’avoir été créé à « image et ressemblance de Dieu ». Il ne nous sera pas difficile de reconnaître dans ce récit la foi en un Dieu Créateur de toutes choses, qui les a faites toutes bonnes et qu’il a voulu placer au milieu de son oeuvre un à être avec une dignité et une responsabilité très spéciales : l’être humain. Peut-être nous serons capables de nous rappeler d’autres passages bibliques qui parlent du même sujet. Si nous disposons d’une bonne Bible, ceci ne sera pas trop difficile et ces passages (qui reçoivent le nom de textes parallèles) sont généralement indiqués en marge (ou en bas de la page) du texte qu’on lit. Dans notre cas, par exemple, nous pouvons rappeler les psaumes 8 ou 114.

Dans ce cas, il sera difficile de mettre en relation le sujet de la Création avec la prédication et la vie Jésus, car si ce n’est pas quelque chose qui apparaît explicitement dans ses Paroles. Quelqu’un, par contre, pourrait rappeler certaines de ses paraboles, puisqu’elles présupposent une étonnante capacité de contemplation de la création de Dieu. Par exemple Mt 13,31-32, ou les paroles de Jésus à propos de Dieu qui gouverne le cours du soleil et des pluies (Mt 5,43-48).

Appropriation du témoignage de foi

En cette phase il est nécessaire de faire nôtre, personnellement ou collectivement, le message du texte, en essayant de voir ce qu’il peut apporter à notre expérience de foi pour l’enrichir. Nous pouvons nous servir de quelques questions qui peuvent nous orienter :

– Y a-t-il dans le texte des paroles, des images, des personnages qui peuvent m’aider à exprimer mes propres convictions de foi, cela pour moi est-ce une Bonne Nouvelle ?

– De quelle manière ce texte m’invite à vivre aujourd’hui la foi avec davantage de dynamisme?

Dans un monde où l’équilibre écologique est constamment menacé, et où chez beaucoup de gens grandi la sensibilité pour conserver le patrimoine naturel, la lecture de ce passage devrait réveiller dans les croyants des sentiments d’admiration et de responsabilité pour quelque chose de tellement précieux en soi comme l’est la Création. En rappelant que tout ce que Dieu a fait est bon et il l’a mis au service de l’homme, non pour qu’il le détruise, mais pour qu’il l’administre avec responsabilité, nous sommes invités à nous engager par notre foi dans la sauve-garde de l’environnement. Que l’être humain doive « dominer » la Création, comme on le lit en Gn 1,28, ne peut jamais être compris comme un droit de l’annihiler parce que cela supposerait annuler l’œuvre de Dieu, mais doit être compris comme un devoir à l’utiliser avec modération et sens de responsabilité.

D’un autre point de vue c’est une « Bonne Nouvelle » reconnaître, comme on affirme en Gn 1,27, que Dieu en créant l’être humain à « son image et à sa ressemblance » l’a créé comme « homme et femme », ce qui nous rappelle l’égalité radicale des deux sexes, aux yeux du Créateur. Nous ne pouvons, par conséquent défendre, à partir de notre foi, des positions sexistes ou machistes d’aucun type.

Troisième étape : La prière

On termine avec une prière, en reprenant les paroles, les images ou les expressions qui ont davantage attiré l’attention de chacun. En continuant avec notre exemple, nous pourrions terminer en rendant grâce à Dieu le Créateur pour son oeuvre, ou en le louant pour sa présence dans la création, en essayant de nous inspirer du texte-même de la Bible pour notre prière : Merci, Seigneur, parce que tout ce que Tu as créé est bon. Eveille en nous la capacité de nous émerveiller devant tant de beauté. Aide-nous à utiliser ce que Tu nous as donné pour en profiter, sans mettre en danger, ni détruire ton oeuvre.

Si le prière est faite en groupe elle peut terminer par une prière commune ou un psaume approprié récités tous ensemble.

2.2 SCHÉMA DE L’ITINERAIRE

Première étape : la lecture

  • Courte prière pour se préparer à la lecture.
  • Lire pour la première fois : intégralement sans se poser de questions.
  • Lire une deuxième fois : consulter les notes de la Bible. Étude du texte.

Deuxième étape : La méditation

  • Chercher le témoignage de foi du texte : Quelles convictions de foi y sont exprimées ?
  • S’approprier du témoignage de foi dans sa propre vie. Comment ce texte peut-il m’aider à vivre et à exprimer ma foi?

Troisième étape : La prière

  • Exprimer, à partir du texte lu et médité, une prière personnelle.
  • Réciter tous ensemble une prière ou un psaume approprié.